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Thomas Fauchez, Docteur en physique au GSFC de la NASA.

par | Nov 25, 2023 | Interviews / Podcasts, Retrouvez toutes nos actualités | 0 commentaires

Thomas Fauchez est Docteur en physique au Goddard Space Flight Center (NASA), situé à Washington. Ses recherches portent sur la modélisation des atmosphères, du climat et des exoplanètes, avec un accent particulier sur leurs nuages. Il s’intéresse en particulier à mieux comprendre l’atmosphère des exoplanètes rocheuses, et tente de déterminer, de détecter les biosignatures avec les observatoires spatiaux. Avant d’occuper ce poste, Thomas Fauchez était chercheur postdoctoral au Centre Spatial Goddard (NASA), dans le laboratoire « Climat et Rayonnement ».

« Croyez en vos rêves ! Il y a plein d’exemples de réussites dans la société.»

 

« Sur Vénus c’est très intéressant parce que la planète n’est plus du tout habitable au moins dans notre définition. Mais elle a pu l’être dans le passé. Nous avons de nombreuses missions en court, qui ont été acceptées ces dernières années. A la fois du côté européen(ESA) avec EnVision et du côté américain avec Veritas porté par le Jet Propulsion Laboratory (JPL), sur la côte ouest et DaVinci au Goddard flight Space Center avec du personnel de mon laboratoire. Ce sont trois missions qui vont étudier Vénus de manière plus approfondie : qu’est-ce qui a fait que Vénus a évolué de la façon dont elle a évolué ? Est-ce qu’elle a pu être habitable dans le passé ? Aujourd’hui, il y a encore beaucoup de débats. »

L’interview d’exception de Thomas Fauchez, Docteur en physique au Goddard Space Flight Center (NASA):

 

En vidéo sur Youtube:

 En podcast :

Je suis exoplanétologue à la NASA au Goddard Space Flight Center, à proximité de Washington. Exoplanétologue c’est un terme un peu technique, je suis un expert des exoplanètes, c’est-à-dire des planètes qui tournent autour de leurs étoiles en dehors de notre système solaire. On a plusieurs casquettes avec ce type de métier : on est à la fois astrophysicien puisqu’on regarde des étoiles, donc des astres. On étudie des planètes on a donc ce côté planétologie. On essaie de comprendre quels types d’atmosphères elles peuvent avoir, quels types de climats, de surfaces… Enfin, on est aussi astrobiologiste parce qu’on essaie de chercher la vie dans l’univers, les conditions favorables et les indices, les biosignatures pour la confirmer.

Quels sont les challenges de l’astrobiologie en ce début du 21e siècle ?

 

Il y en a beaucoup ! Le challenge numéro 1, c’est qu’on est un peu coincé dans un paradigme c’est-à-dire que la seule planète habitable, connue et habitée par la vie, c’est la terre. Cela signifie qu’on a un seul point de référence! C’est très compliqué d’essayer de chercher d’autres points de référence lorsqu’on en a qu’un seul à la base. Toute la vie sur Terre est basée sur la chimie du carbone, la chimie organique. De ce fait, c’est difficile d’imaginer une forme de vie qui serait basée sur quelque chose de différent et c’est vraiment l’obstacle principal, d’essayer d’extrapoler à partir d’un point de référence. Ensuite, au sein du système solaire, on a la possibilité via des missions que l’on envoie sur Vénus, Mars, voir au-delà,.. De faire des mesures in situ, ce qui est plus intéressant pour les scientifiques. Ainsi on peut vraiment obtenir des données de grandes fiabilités. Un autre challenge dans l’astrobiologie, au-delà du système solaire, pour rechercher la vie sur les exoplanètes, c’est principalement la recherche des biosignatures. Des indices biologiques via l’émission de gaz que l’on sait être relié à la vie comme l’ozone(O3), le méthane (CH4), l’oxygène (O2), etc. Si on recherche ces molécules dans l’atmosphère d’une exoplanète cela peut être dû à la vie, mais il y a d’autres mécanismes chimiques, géologiques qui peuvent créer ces molécules. Néanmoins, cela peut aussi nous induire en erreur. C’est assez compliqué, parce que même si un jour on détecte ces molécules clés, il faudra être sûr du véritable contexte sur cette planète pour en connaître la source.

 

Deux à trois missions actuelles en astrobiologie ?

 

Il y en a énormément. Même si on pense au système solaire, je pense notamment à Vénus. On peut éviter mercure qui n’a pas vraiment une atmosphère mais une exosphère. L’astrobiologie sur Mercure on va un peu l’oublier. Sur Vénus c’est très intéressant parce que la planète n’est plus du tout habitable, au moins dans notre définition. Mais elle l’a peut-être été dans le passé. Nous avons de nombreuses missions en court, qui ont été acceptées ces dernières années. À la fois du côté européen(ESA) avec EnVision et du côté américain avec Veritas porté par le Jet Propulsion Laboratory (JPL), sur la côte ouest des États-Unis, et DaVinci au Goddard flight Space Center avec du personnel de mon laboratoire.

Ce sont trois missions qui vont étudier Vénus de manière plus approfondie : qu’est-ce qui a fait que Vénus a évolué de cette façon? Était-t-elle  habitable dans son passé ?

Aujourd’hui, il y a encore beaucoup de débats.

Mais même sur Terre, vous avez beaucoup d’astrobiologistes qui étudient les environnements extrêmes pour chercher ce qu’on appelle les extrémophiles qui sont des bactéries qui peuvent résister à des environnements très complexes. Cela, c’est vraiment de l’astrobiologie parce qu’après nous le mettons en contexte dans un environnement plus large, planétaire et interplanétaire.

On a beaucoup d’orbiteurs autour de Mars, on a des rovers comme Curiosity et Persévérance qui cherchent encore une fois des évidences potentielles d’une vie passée, on cherche le fil de l’eau, on a maintenant de grandes preuves qu’il y a eu de l’eau sur Mars. Ensuite après on peut aller même sur les lunes de Jupiter et Saturne on peut aller sur les missions des lunes de la planète Jupiter comme Encelade ou Europe, on a la fameuse mission Europa Clipper qui va étudier Europe.

Les éjections de matière que l’on voit viennent d’en dessous de la surface d’Europe parce que l’eau n’est pas à l’état liquide sur la surface de ce type de corps, mais on pense qu’il y a l’eau à l’intérieur de ces lunes. Par des sortes de cryovolcans, des volcans, on peut voir la matière qui est éjectée de la surface de la Lune. Mon laboratoire participe à une mission, dans l’horizon 2040, à l’élaboration du concept c’est HWO, c’est-à-dire Habitable World Observatory cela signifie l’Observatoire des mondes habitables. Voilà l’objectif de ce télescope, de la taille équivalente à James Webb, mais observant dans l’ultraviolet visible et proche infrarouge. L’un des buts de la mission sera d’imager une exo-terre autour d’un exo-soleil c’est-à-dire voir le point bleu pâle autour d’une étoile comme le soleil et ensuite essayer d’analyser cette atmosphère et rechercher des formes de vie. Cette mission va peut-être nous permettre de répondre à la question: « Sommes-nous seuls dans l’Univers ? »

 

 

 

Vous avez créé TRAPPISTE-1 THAI

 

 L’idée m’est venue justement avec Shawn Domagal-Goldman, le premier mois dans lequel je suis arrivé dans son équipe. On a eu une discussion sur ce que je pouvais apporter dans l’équipe. Au même moment, il y a eu une conférence nommée Habitable World c’est-à-dire les mondes habitables, dans le Wyoming aux États-Unis. Comme je venais de commencer ma nouvelle affectation, je n’ai pas eu la possibilité de m’y rendre. Il y avait beaucoup de chercheurs de la simulation climatique d’exoplanètes qui se sont rencontrés. Durant un dîner, ils ont discuté de la nécessité de comparer ces modèles, puisqu’ils sont développés à l’international, dans plein de groupes différents et ces modèles sont extrêmement complexes. On appelle cela des GCM pour Global Climate Model, modèle de climat globaux. Il s’agit des mêmes modèles que l’on utilise sur Terre pour prédire l’évolution du climat terrestre avec le réchauffement climatique. On les applique à des exoplanètes en changeant les paramètres. Ils se sont donc réunis autour d’une table, dans un restaurant thaïlandais, pour discuter de la nécessité de faire des intercomparaisons puisque le problème actuel avec les exoplanètes c’est qu’on a très peu de données, on a celles pour les plus grandes exoplanètes, mais pas pour les plus petites. Lorsqu’on utilise des modèles pour essayer de prédire leur composition, il n’existe aucun moyen vraiment de valider ces modèles, c’est complexe. On n’a pas d’informations pour les calibrer. Le mieux que l’on puisse faire c’est comparer les modèles ensemble pour au moins être d’accord et avoir quelque chose d’harmonieux lorsqu’on fait des prédictions et éventuellement l’interprétation des données. C’est ce qui est devenu ce projet, on a voulu se focaliser sur la planète TRAPPIST-1 e qui est une des planète avec le meilleur potentiel pour l’habitabilité que l’on connaisse, c’est dans ce système TRAPPIST-1 qui est situé à 40 années-lumière environ et qui possède 7 planètes rocheuses dont trois dans la zone habitable TRAPPIST-1 e f et g .

Rencontres particulières

 

Oui, c’est toujours très intéressant dans un cursus. Il y a plein de rencontres qui sont très positives, je pense, à mon premier stage à l’Université de Liège. J’avais eu la chance de rencontrer M. Éric Gosset lors d’une porte ouverte de la société astronomique de Liège pour la recherche d’un stage. Il a bien voulu m’accueillir en tant qu’étudiant de stage et ça a été mon premier contact à la recherche. C’était vraiment une période passionnante! Ensuite,c’est M. Philippe Dubuisson (Université de Lille) qui a été mon directeur de thèse principal aussi avec Céline Cornet et Frédéric. C’était le professeur que j’avais eu en licence et qui m’a recontacté à la fin de mon Master pour me proposer une thèse de doctorat. Il a été une personne clé dans mon parcours. Puis, il y a un chercheur du laboratoire de Lille, M. Oleg Dubovik, durant mon pot de thèse, lorsque j’ai été nommé docteur, m’a promis de me mettre en relation avec un chercheur de la NASA, M. Steve Platnick. Il a vraiment tenu parole, il m’a bien mis en contact et c’est avec Steve Platnick que j’ai écrit mon projet pour le postdoctorat de la NASA. Cela m’a permis d’être sélectionné sur dossier. Pour finir, l’un des derniers qui a été une personne clé aussi, c’est Shawn Domagal-Goldman qui est mon responsable actuel. Très grand astrobiologiste, de renommée mondiale, que j’ai rencontré au Goddard Space Flight Center (GSFC).

 

Article de :

  • Halim BENNADJA, chef de projet à l’Association Odyssée Céleste
  • Montage Vidéo/Podcast : Halim Bennadja
  • Date de réalisation : 16 novembre 2023
  • Copyright images: Association Odyssée Céleste/ NASA/ ESA/ Université de liège / Université de Lille

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Thomas Fauchez, Docteur en astrobiologie au Goddard Space Flight Center (NASA)